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*** Lumière sur une artiste ***

Marie Bagi vous présente,

Silvia Velázquez 

"Artiste plasticienne et dessinatrice"

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            Aujourd’hui je vous présente l’artiste Silvia Velázquez que j’ai rencontré au Bleu lézard autour d’un apéritif orangé. Elle me raconte son chemin de vie et comment il l’a conduit en Suisse mais principalement vers l’art. Solaire, Silvia transmet, dès les premiers instants, la joie et la bonne humeur ainsi que l’envie d’en savoir plus.

Née à Maldonado, en Uruguay, Silvia est arrivée à Lausanne en 2009. Autodidacte, elle a souvent été appelée à prouver le sérieux de sa pratique artistique ou encore, d’autres ont décrété que c’était très masculin ce qu’elle fait. Mais de cela, Silvia n’en fait pas cas car ce qui compte c’est ce qu’elle a sur le cœur et qu’elle a besoin de l’exprimer. Et, dans le fond, c’est ce qui fait foi dans sa quête artistique. Cette dernière s’articule autour du dessin, principalement les arts graphiques car Silvia adore travailler sur papier – elle possède d’ailleurs une passion pour les estampes – ainsi que les installations. A la fin du gymnase en Uruguay, elle n’a pas fait l’école d’art et pourtant, les tests d’aptitudes l’avaient envoyé à cinquante pourcents aux Beaux-Arts. Mais ce sont les cinquante autres pourcents qui ont guidé les premiers temps de sa vie : l’économie. Elle s’est donc dirigée vers l’administration d’entreprises car c’était plus proche de la maison. Elle a fait un choix qui n’était pas celui du cœur, me dit-elle.

Depuis l’enfance, Silvia a toujours été créative même si, durant ses années hors de l’art, elle n’eut que très peu de temps pour la création. C’est grâce à sa venue en Suisse qu’elle a pu s’y consacrer pleinement. Petite, elle adorait dessiner et sa mère ne pouvait pas tout garder ce qu’elle faisait car elle en faisait trop, dit-elle en riant. Personne de son entourage était artiste et elle allait souvent seule au musée. L’idée de la précarité artistique a toujours refroidi sa famille. Aujourd’hui, pourtant, elle réussit à l’intéresser à son art, à ses figures géométriques. Elle a une grande famille, poursuit-elle, sa mère a seize frères et sœurs et elle est la première à y apporter l’art. Silvia aime beaucoup voyager et allait très souvent à Buenos Aires, Argentine. C’est là qu’elle a connu son mari – d’origine française qui travaillait déjà en Suisse. Ils ont voyagé beaucoup. Elle aime la spontanéité même si, depuis petite, elle essaie de planifier sa vie un minimum. Avec elle, elle emporte toujours son petit carnet de croquis où elle transpose également ses idées, ses mots ou encore ses photographies.

L’œuvre de Silvia se compose principalement d’éléments géométriques. Pourquoi la géométrie ? Elle me répond que c’est relié à l’idée que nous avons des choses et que ces dernières, elle les transmet. Les émotions sont ses principaux sujets et elle travaille actuellement sur la nostalgie. Depuis petite, même si elle est positive, elle aime les éléments qui sont reliés au passé et qui ramènent au sentiment de nostalgie. Cette dernière l’aide à surpasser les moments difficiles et elle en fait ressortir toute la positivité. En Uruguay, elle me dit qu’il existe une « nuit de la nostalgie » qui est célébrée juste avant la déclaration de l’Indépendance. Cette nostalgie, elle la ressent tous les jours avec son pays. Dans la géométrie qui est abstraite, elle replace cette nostalgie négative en positive. Elle enquête beaucoup et en apprend tous les jours, ajoute-elle. La création étant une activité solitaire, elle souhaite davantage de partage dans cette recherche. En novembre dernier, elle remporte un concours à Nyon avec dix-sept de ses dessins géométriques qui lui a donné le privilège d’avoir une exposition personnelle. Son atelier, elle le possède depuis 2013 et c’est grâce à la Ville de Lausanne qui le lui a attribué. Elle me parle ensuite de dessins A4 qu’elle a réalisé sur le thème de la « petite famille » et c’est l’une des raisons pourquoi elle travaille la géométrie car nous pouvons toujours s’approprier cette petite famille : deux adultes et un enfant. Elle transmet ainsi l’idée qu’elle a une famille mais aussi le sens de l’unité familiale. Les personnes de cette famille sont carrées, une forme simple à individualiser et qui découle de son obsession pour le cube qui représente la stabilité pour l’artiste. Elle se voit d’ailleurs comme un carré, dit-elle en riant. Elle a posé la question à cent personnes pour savoir comment elles se voyaient. Cinquante-neuf personnes ont répondu, mais seulement six se voyaient comme un cube ou un carré. Elle a essayé de guérir de cette obsession du cube mais très difficile, ajoute-elle, toujours en riant. De plus, il n’y a pas un carré similaire, ce qui augmente son intérêt pour cette forme. Elle aurait souhaité trouver un éditeur intéressé mais difficile, donc elle a choisi de l’autoéditer. Elle avait même éveillé l’intérêt de son entourage pour cette recherche en leur demandant de participer à l’élaboration d’un livre. Elle aime cela, réveiller la curiosité de sa famille et aussi du public, en général, ainsi, elle peut prendre le temps de l’expliquer mais aussi ils peuvent dire ce qu’il pense de son art. Elle me raconte d’ailleurs l’exemple d’une jeune femme de vingt-deux ans qui lui a dit ce que cela évoquait chez elle. Et cela, c’est précieux pour Silvia. Elle aime toucher le public et avoir ses interprétations. Cela lui fait voir les choses différemment sur sa création. Cela l’enrichit. Avec la géométrie, continue-t-elle, il y a beaucoup de liberté non seulement pour elle mais aussi pour celui qui la regarde. Parallèlement à la nostalgie, elle travaille sur les thématiques de la peur et des choix. Depuis janvier 2020 et l’apparition du coronavirus en Suisse, elle a laissé la thématique de la peur – qu’elle reprendra – pour travailler sur le choix ; dix-sept dessins pour le moment mais elle souhaite en réaliser plus en formats variables dont les détails sont nombreux. L’utilisation de la couleur dépend du sujet. Lorsqu’elle représente la joie, elle ajoute de la couleur à ses dessins mais lorsqu’il s’agit d’émotions plus sombres telle que la peur, elle utilise le noir et blanc. La couleur vient donner de la lumière à son état émotionnel.

Pour elle, il est plus facile de dessiner que de parler. Elle me donne une situation personnelle pour expliquer ses mots. A l’annonce du cancer de son père, il y a quelques années, elle a dessiné ce qu’elle a ressenti : un grand triangle qui tombe comme une flèche. Heureusement, aujourd’hui, il est guéri. Mais elle s’est sentie plus libre de l’exprimer ainsi. Elle adore ce dessin malgré le fait qu’il lui rappelle une période triste. Cela fait partie de la vie. Maman d’un petit garçon de six ans, il est son plus grand fan et la complimente toujours sur ses créations en disant que c’est magnifique, un soutien précieux pour l’artiste. Après une exposition, elle prend toujours deux ou trois jours pour rester tranquille car elle déteste le vide que cela laisse lorsque c’est fini. Pourtant, le vide est nécessaire pour recommencer. Et de cela, Silvia en est consciente. Elle met donc son énergie à chaque fois recommencer puisque la beauté de la chose c’est non seulement de créer mais aussi de partager. Et Silvia sait le faire. Elle possède une aisance, malgré ce qu’elle peut dire, à parler de son travail et c’est très précieux. La forme géométrique l’accompagne dans son travail et l’aide à partager ses émotions sur le papier. D’une nature ouverte, Silvia n’a pas fini de nous faire plonger dans son monde magique qui a beaucoup de choses à offrir.

 

 

 

 

Auteure : Marie Bagi, docteure en Histoire de l’art contemporain et Philosophie

 

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Publié le 14 septembre 2021

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